marți, 3 februarie 2015

Rousseau - Les confessions

L'histoire de Rousseau, racontée dans les Confessions, expose la chute de l'enfant chéri à l'enfant perdu à travers le trois mythes : celui de l'âge d'or (il perd progressivement son innocence et le bonheur comme aux premiers temps de l'humanité), celui du paradis terrestre (il quitte l'univers du Bien pour celui du Mal, comme Adam et Ève), et celui de l'état de nature (hypothèse philosophique qui lui permet de réfléchir sur les fondements de la société). Pour Rousseau, l'enfance est plus qu'un âge privilégié, c'est un état d'innocence dont il parle toujours avec respect ; il en a une conception originale qui s'appuie sur trois grands mythes de l'innocence perdue.
L'idée qu'un obscur dessein se complote contre Rousseau, qu'une conspiration se dresse contre sa liberté est un fil directeur de cette autobiographie. Le destin offre une explication aux tribulations successives de Rousseau qui va de paradis perdu en paradis perdu ; il les justifie en leur conférant une sorte de nécessité. Il découvre le sens et la globalité de cette destinée en accumulant les expériences et les détails de son analyse a posteriori. Sa naissance est le premier maillon de sa destinée malheureuse : "Ma naissance fut le premier de mes malheurs.", écrit-il au livre I.
Il faut voir dans cette fatalité la portée dramatique et sa fonction narrative : Rousseau est le héros tragique de ces situations de catharsis (mot grec signifiant, en littérature, le "mieux-être", le soulagement, l'élévation). Explication de l'autobiographe ou justification de ses responsabilités, Rousseau suggère que cette fatalité l'empêche de s'épanouir et l'arrache à ses dispositions réelles et à l'existence espérée.
A sa décharge, il est conscient de sa responsabilité et de cette solution trop facile qui consiste à tout imputer son comportement au destin ; seules importent, en fait, la sincérité et la pureté des intentions et des sentiments plus que les faits réels. La théâtralisation de certaines anecdotes ou situations accentue encore cette dimension de l'oeuvre en ménageant des effets de retardement narratif par des élans lyriques ou des coups de théâtre.
Les préoccupations de Rousseau s'opposent à celles de son époque. Le XVIIIe siècle est le siècle des Lumières : l'esprit et la raison triomphent et les écrivains veulent que les clartés de l'intelligence règnent sur l'univers. Il choisit la sensibilité contre la raison d'un Montesquieu, la sincérité contre l'ironie d'un Voltaire, l'individu contre la société : il tourne ainsi le dos aux débats littéraires de son époque et se marginalise. Dans les Confessions, il associe narration et analyse psychologique (phénomène d'introspection) et oscille sans arrêt entre le désir et la loi.
Rousseau apparaît comme un rêveur romantique qui a été influencé par ses lectures d'enfance : l'univers des romans médiévaux est fortement présent ; il préfère les créatures de son imaginaire à la réalité. Lecteur de Gil Blas de Lesage, Rousseau découvre le roman picaresque(oeuvre mettant en scène les mésaventures d'un picaro) et le picaro (marginal vivant d'expédients et parodiant les héros des romans chevaleresques sans scrupule, qui vagabonde à travers les divers milieux sociaux) auquel il s'identifie. Sa fréquentation de tous les milieux lui permet de faire découvrir à travers ses récits les masques et les types sociaux des plus aristocratiques aux plus humbles : "Tantôt héros, tantôt vaurien" (livre III), dit-il de lui-même.
Enfin, par opposition au refoulement de l'intimité, les nouvelles formes d'écriture romanesque qui se mettent en place dès la fin du XVIIe siècle, témoignent de la mise en scène d'un sujet romanesque fondateur de l'effet de vérité du texte. Romans picaresques, histoires secrètes, et plus encore romans par lettres signalent le besoin de créer l'illusion d'une communication immédiate où l'effet de vérité tient à la reconnaissance intime d'un sujet écrivant par un sujet lisant.
  Rousseau n'envisagera donc l'authenticité que comme stratégie ou comme mythe, lui qui ne se consacre qu'à l'expertise de ses alibis et du corpus textuel et culturel qui le constitue.
Loin d'être une saisie intégrale du passé, le récit autobiographique est le travail d'un artiste : il obéit à une logique propre, alliant nécessité(l'écrivain choisit des épisodes singuliers, les recompose, montre en quoi ils sont particulièrement significatifs) et plaisir (l'écrivain retrouve la vivacité d'une émotion passée, il la met en valeur, s'efforce de la transmettre au lecteur) : il transforme l'expérience vécue en aventure littéraire.
- Dans un récit qui épouse la chronologie de l'histoire personnelle, on remarque des éléments de perturbation, qui jouent sur la distance entre le temps du souvenir et le temps de l'écriture.
Rousseau fait fonctionner son récit sur plusieurs niveaux en "se livrant à la fois au souvenir de l'impression reçue et au sentiment"(Préambule de Neufchâtel). Cette structure superpose le récit et son commentaire, le temps du passé revécu et le temps du narrateur. Le va-et-vient permanent entre le passé et le présent conduit Rousseau à raconter ce moment jusque-là inavoué afin de se déculpabiliser dans le présent par sa confession.
Rousseau, entraîné par les "retours du passé" , rédige une autobiographie qui s'apparente par ses modalités à un récit rétrospectif mais où les éléments de sa propre existence se pressent en dehors de toute chronologie, une succession "d'affections secrètes". La mémoire affective (et involontaire) offre donc à Rousseau l'occasion de retrouver le paradis de l'enfance, où le rêve et la réalité communiquaient encore.
La première partie des Confessions est d'abord un long catalogue de descriptions de personnages disparus, que Rousseau ressuscite par la magie du souvenir et de ses corollaires : l'analyse morale et l'analyse philosophique. Le narrateur - le Rousseau lucide et penseur - établit en fait au fur et à mesure de ces quatre livres une véritable archéologie de sa pensée..., de son être : il sent, il pense, il est.
Plus on avance dans la lecture de ce texte, plus le lecteur prend de l'importance : jusqu'à l'aveu final, Rousseau laisse entendre qu'il est impossible pour le lecteur d'être passif. Les concessions disparaissent, et Rousseau jouit enfin de sa personnalité pleine et entière.
Il est clair que le texte des Confessions est marqué par la volonté bien ambitieuse et bien peu réaliste de "tout dire". Cet objectif, comble de l'honnêteté de l'autobiographe induit donc une écriture sans passage romancé, sans autre description que celle des faits et de leurs ressorts psychologiques. Toute idée d'intrigue se laisse donc dépasser par un parcours chronologique sans réelle exception (peu de flash-back ou de projection dans le futur) fondé sur une rétrospection fidèle. L'ennui pourrait bien guetter le lecteur si le narrateur ne maintenait le lecteur en haleine par la mise en place d'un dialogue artificiel et rhétorique nécessitant autant un confessé qu'un confesseur et surtout un confident.

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